Revue de presse

"La trahison du Crif" (Eric Conan, Marianne, 26 nov. 11)

5 décembre 2011

"Parmi les nombreuses réactions suscitées par le tragicomique accord électoral entre le Parti socialiste et les Verts, la plus sidérante est passée presque inaperçue. Il s’est, en effet, trouvé quelqu’un pour dresser la liste des députés PS victimes de ces négociations et nous apprendre qu’ils étaient... juifs. Ce ne fut cette fois ni Jean-Marie Le Pen ni l’islamiste Tariq Ramadan, habitués de ce genre d’exercice, mais Richard Prasquier, président du Conseil représentatif des insitutions juives de France (Crif). Lequel ajoutait, avec une dose massive d’hypocrisie : « Il est tentant de parler d’antisémitisme, certains l’ont déjà fait et je me garderai de les suivre. »

Il faut évidemment préciser que les députés évincés ne s’étaient pas plaints d’antisémitisme (mais plutôt de consternants règlements de comptes au sein du PS), qu’ils n’ont pas l’habitude de mettre en avant une identité particulière et qu’ils n’avaient donc entrepris aucune démarche auprès de M. Prasquier. C’est précisément le propre du communautarisme de ne pas se soucier de l’avis de ceux qu’il enrégimente.

Car c’est bien le communautarisme le plus simpliste que prône le président du Crif, qui dit s’inquiéter de voir diminuer dans la région parisienne la... « représentation politique juive ». Il faut mesurer la nouveauté et la gravité d’une telle expression dans une démocratie républicaine et laïque. C’est une trahison de la féconde tradition du judaïsme français qui est heureusement défendue par l’indispensable grand rabbin de France, Gilles Bernheim, qui refuse « un judaïsme français inféodé à l’étranger », préférant professer un judaïsme qui doit « donner à penser à ceux qui ne croient pas en lui ».

Inacceptable, cette expression de « représentation politique juive » est politiquement aussi inappropriée qu’explosive : M. Prasquier encourage tous ceux qui, dans les banlieues, ne pensent plus l’action politique qu’au travers des indentités ethniques et religieuses et s’efforcent d’introduire le conflit israélo-palestinien en France. [...]

[C’est] le moment qu’a choisi Bernard-Henry Lévy pour déclarer devant le même Crif que c’est « en tant que juif » qu’il a participé à l’intervention en Libye, par « fidélité au sionisme et à Israél ». Et il a ajouté : « Je ne l’aurais pas fait si je n’avais pas été juif. » Ah bon ?... Alors, que pense le philosophe-guerrier de ses alliés qui, en l’absence de tout ressort identitaire, ont cru devoir approuver cette intervention au nom des droits de l’homme et de la luttre contre les dictatures ?"


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