Revue de presse

"L’enseignement catholique se défend face à un rapport à charge" (Le Figaro, 2 av. 24)

(Le Figaro, 2 av. 24) 2 avril 2024

[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Deux députés pointent l’opacité du financement des écoles sous contrat. Il est « transparent », réplique le représentant de ces établissements.

Par Caroline Beyer

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La « guerre scolaire » ? Personne ne songe sérieusement à la ranimer depuis 1984 et la grande manifestation des défenseurs de l’« école libre » contre le projet de loi Savary, qui visait à intégrer les écoles privées à un « grand service public ». Mais voilà près d’un an et demi que l’enseignement privé catholique (qui regroupe 97 % des établissements sous contrat) est régulièrement interrogé sur sa contribution à la mixité sociale, ses financements et son contrôle par l’État.

Ce 2 avril, deux mois après la polémique sur la scolarisation des enfants de la ministre Amélie Oudéa-Castéra dans le privé et la révélation par Mediapartd’un rapport de l’inspection pointant des « dérives » à Stanislas, fleuron parisien de l’enseignement catholique, c’est un rapport parlementaire à charge qui le place à nouveau sous le feu des projecteurs. « Un rapport qui part de certains dysfonctionnements réels pour généraliser », estime le secrétaire général de l’enseignement catholique Philippe Delorme, qui a été auditionné deux fois. « On voudrait que l’école privée ait moins de sous et qu’elle ressemble à l’école publique ! », résume-t-il, dénonçant des « combats d’arrière-garde » et le « règne de la caricature ».

Si ce rapport n’entend pas faire « table rase de l’existant » - le cadre de la loi Debré, dans lequel l’État finance en échange du respect des programmes scolaires -, il pointe un système opaque et recommande de renforcer le contrôle. Il a été rédigé par deux députés, l’un LFI, l’autre Renaissance. Le premier, Paul Vannier, est agrégé de géographie et a enseigné dans l’académie de Créteil. Il a rédigé le programme « éducation » de Jean-Luc Mélenchon lors de la dernière présidentielle. L’enseignement catholique privé n’est pas vraiment sa tasse de thé. Depuis son entrée à l’Assemblée, en 2022, il veut « rouvrir le débat démocratique » sur le financement du privé. Les récentes polémiques autour d’Amélie Oudéa-Castéra et de « Stan » lui ont donné du grain à moudre. Paul Vannier est à l’initiative de cette mission d’information lancée en juillet, peu après un rapport de la Cour des comptes appelant, en juin, à un renforcement du contrôle de l’État, et la signature, en mai, d’un protocole entre le ministre de l’Éducation Pap Ndiaye et l’enseignement catholique visant à renforcer la mixité dans les établissements sous contrat. Le second rapporteur, Christopher Weissberg, est député de la majorité présidentielle. Ancien élève de l’école privée bilingue Jeannine-Manuel, il assure n’avoir « aucun préjugé » sur l’enseignement sous contrat.

Subventions variables
À l’arrivée, un rapport de 175 pages et 55 propositions, sur lesquelles les deux députés ne s’accordent pas pour moitié. Celles du député insoumis sont plus radicales. Paul Vannier veut ainsi abroger la loi Falloux de 1850, qui permet aux collectivités de verser aux établissements sous contrat une subvention facultative limitée à 10 % des dépenses annuelles de l’établissement. Dans la pratique, ces subventions sont très variables d’une collectivité à une autre et relèvent, pour beaucoup, de choix politiques. En Île-de-France, elles ont augmenté de 450 % en sept ans tandis qu’en Provence-Alpes-Côte d’Azur, elles ont fortement diminué ces dernières années. « Elles financent du patrimoine, pas une politique éducative », affirme Paul Vannier. Christopher Weissberg, lui, souhaite laisser cette liberté de subvention aux collectivités, tout en « contrôlant mieux le fléchage et l’usage de ces financements ».

Sur la question de l’exclusion ou de la non-réinscription d’élèves, le député LFI propose une pénalité financière de 10.000 euros par élève. Côté Renaissance, Christopher Weissberg veut donner au recteur le pouvoir d’autoriser toute non-réinscription. « Lors de cette mission, j’ai découvert une grande diversité d’établissements privés, explique-t-il. À Marseille, on trouve aussi bien le collège Lacordaire, un établissement d’élite, qu’une école de la dernière chance, dans les quartiers nord. » Paul Vannier, lui, explique avoir découvert que « personne ne peut indiquer le montant précis des financements publics » et dénonce « une volonté des administrations à ne pas construire cette information ». Selon la Depp, le service statistique de l’Éducation nationale, les établissements privés sous contrat ont perçu en 2022 environ 13,8 milliards d’euros, dont environ 10,4 milliards d’euros d’argent public (8,5 milliards de l’État et 1,9 milliard des collectivités), complétés par 3,3 milliards venus des familles et 159 millions versés par des entreprises. Les deux députés préconisent davantage de transparence et de contrôles, à la fois financiers, administratifs et pédagogiques. Chacun à leur manière, ils veulent aussi conditionner l’attribution de moyens à des objectifs de mixité sociale.

« Le financement de l’enseignement privé sous contrat n’est pas opaque. Il est transparent. On ne cache pas des donateurs milliardaires qui nous financeraient de façon occulte », a lancé Philippe Delorme lors d’une conférence de presse tenue le 27 mars, en amont de ce rapport, pour dénoncer un acharnement injustifié. « Tout le monde s’y met », résume-t-il, avant de citer, pêle-mêle, des « vieilles ligues qui essaient de se donner une nouvelle jeunesse », des « sociologues et économistes qui formulent des solutions aussi magiques qu’idéologiques », des « militants et syndicats qui bloquent l’accès à nos établissements ». Il reconnaît que les processus de contrôle « ne sont pas toujours mis en œuvre ». « Mais nous sommes à la disposition de la puissance publique pour ces contrôles, voire nous les réclamons », assène-t-il. Quant aux objectifs de mixité fixés dans le protocole de juin 2023, il affirme qu’ils seront « largement dépassés » d’ici trois ans."



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