CLR Valenciennes-Hainaut

Le confiteor de François Fillon (CLR Valenciennes-Hainaut, 6 jan. 17)

6 janvier 2017

Le 23 novembre 2016, dans l’entre-deux tours de la primaire de la droite et du centre, François Fillon présente un discours à Lyon au cours duquel il évoque entre autres l’islam radical. Le désormais candidat à l’élection présidentielle glisse [1] : « Moi, je ne parle pas de lutte contre les communautarismes pour ne pas avoir à nommer le problème que nous avons avec l’islam radical. Le catholicisme, le protestantisme, le judaïsme ne dénoncent pas les valeurs de la République. Cessons donc de faire croire qu’il faut durcir les règles de la laïcité au prix d’attaques inacceptables à la liberté religieuse alors que seule la poussée intégriste qui enflamme le monde musulman est une menace pour notre société. »

Cette déclaration appelle au moins deux commentaires.

Premièrement, si François Fillon ne souhaite pas parler de lutte contre le communautarisme, c’est qu’implicitement il lui tolère une certaine latitude à se développer au sein de la République. À ce jour, son programme n’éclaire guère sur le sujet. Soulignons ici que le communautarisme est un mécanisme idéologique désignant les aspirations d’une minorité culturelle, religieuse ou ethnique visant à se différencier avec pour objectif ultime la dissociation du reste de la société. La revendication communautariste, en s’appuyant sur le droit à la différence, aboutit inéluctablement à la différence des droits, pour faire allusion à Régis Debray [2]. Le communautarisme favorise donc ce qui divise et non ce qui rassemble ; il dissout la citoyenneté et au-delà, corrode le principe même d’une République Une et indivisible, structurée par l’universalisme hérité des Lumières et dont la vertu émancipatrice a fait ses preuves. Ainsi en va-t-il lorsque sont réclamés des accomodements prétendument raisonnables. Ainsi en va-t-il, lorsque, religieux, le communautarisme prétend à ce que des groupes religieux prônent la suprématie de la loi divine sur la loi démocratiquement élaborée, ou à ce que ces groupes souhaitent se soustraire à cette dernière. En prétendant ne pas parler de lutte contre le(s) communautarisme(s), le candidat à la fonction présidentielle prend le risque d’exposer la République à la fragmentation interne et à son cortège de tensions [3].

Deuxièmement, si François Fillon affirme qu’il faut cesser de faire croire qu’il faut durcir les règles de la laïcité au prix d’attaques inacceptables à la liberté religieuse, c’est donc qu’il estime qu’il convient d’assouplir des « règles » que nous aurions préféré qu’il nomme « exigences ». Derrière ce qui ressemble à une banderille plantée dans les 42 articles de la loi de 1905 [4], ne se cache pas moins qu’une laïcité caricaturée sous la forme d’une contrainte antireligieuse et liberticide. Quel que soit le contexte ou l’auditoire, faut-il rappeler qu’il suffit d’appliquer partout en France la loi de 1905 – strictement – sans mollir ni durcir quel que terme qu’elle contient ? Faut-il rappeler que la laïcité est une garantie concernant la liberté de croire ou de ne pas croire et non un obstacle restreignant les libertés religieuses ou philosophiques, ce que laisse supposer l’assertion de M. Fillon ? Enfin, faut-il rappeler que « la laïcité n’est pas une opinion mais le droit d’en avoir une » [5] et qu’en conséquence elle est libératrice ?

En tout état de cause, dans l’extrait cité au début de ce commentaire, l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy avoue quelques unes de ses dangereuses préférences en matière de communautarisme et de laïcité. Aveu ? Dans le cas de François Fillon, il s’agit plutôt d’un confiteor.

[1Voir sur YouTube, entre 1:15 et 1:45.

[2Régis Debray, La République expliquée à ma fille, Seuil, Paris, 1998.

[5Comité Laïcité République Le CLR.


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