Culture / cinéma

Le cas Richard Jewell : le danger d’une enquête policière menée sous la pression de l’opinion (G. Durand)

par Gérard Durand. 10 mars 2020

[Les échos "Culture (Lire, entendre & voir)" sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

Le Cas Richard Jewell, de Clint Eastwood (2 h 09), avec Paul Walter Hauser, Sam Rockwell, Kathy Bates. Sorti le 19 fév. 20

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On peut ne pas aimer tous les films de Clint Eastwood mais on ne peut pas nier son génie dont il nous apporte une nouvelle fois la preuve, après Gran Torino, Dans les brumes éternelles ou Million dollars baby et beaucoup d’autres, Le cas Richard Jewell vient nous le confirmer.

Clint Eastwood a choisi cette fois un sujet qui peut tous nous concerner, à savoir l’aveuglement policier. Richard Jewell est obèse et vit seul avec sa mère. Il a besoin d’ordre, pour lui et les autres, et ne supporte pas qu’on déroge aux règles de la société, c’est pourquoi il se tourne vers des métiers visant à appliquer l’ordre. Il les exerce avec une discipline sans nuances et cela lui a valu quelques déboires, disons qu’il ne recule pas devant des excès de zèle. Viré d’un poste d’adjoint au shérif, puis de vigile dans une université, il n’a de rêve que de se faire intégrer dans la police officielle.

Engagé par une société privée, il se retrouve dans l’équipe chargée de la sécurité des jeux Olympiques d’Atlanta. Il ouvre l’œil et le bon et déclenche, malgré le scepticisme de ses collègues, une alerte qui va permettre de sauver de nombreuses vies lors d’un attentat à la bombe. Le voila devenu héros national et pendant quelques semaines sa vie se partage entre émission télévisées et interviews dans la presse.

Mais le FBI est chargé de trouver le coupable et va très vite soupçonner Jewell, il est déjà arrivé que le « découvreur » d’une bombe soit celui qui l’avait posée et l‘examen de son profil psychologique (médiocre en recherche de reconnaissance) va dans ce sens. Les soupçons semblent fondés et les journalistes ne tardent pas à les relayer, faisant passer Jewell du statut de héros à celui de l’homme le plus détesté du pays. Le FBI tient son coupable et rien ne le fera dévier de cette conviction qui, en outre, a l’avantage de ne pas avoir à enquêter ailleurs.

Jewell va chercher un avocat et il se souvient que dans un de ses précédents emplois, il en avait rencontré un plus sympathique que les autres « le seul qui m’ait traité comme un être normal ». Il s’agit d’un avocat d’affaire qui, pourtant, après quelques hésitations va se prendre au jeu et réussir à obtenir un non-lieu. Le FBI, obligé de reprendre l’enquête mais toujours convaincu de sa culpabilité, va finir par découvrir le vrai coupable trois mois plus tard, alors que Jewell a été intégré dans la police officielle. La suite est, comme très souvent chez Eastwood un mélange de soulagement et de tristesse.

Nous assistons au danger que représente une enquête policière menée sous la pression de l’opinion, le premier soupçonné est le bon et on le livre à la foule par le biais de fuites savamment orchestrées vers une presse de vautours sans se soucier des éventuels dégâts.

Qui peut se vanter d’être à l’abri d’une telle situation ?

Un grand film à voir sans hésiter

Gérard Durand


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