Revue de presse

"La laïcité à poil" (E. Conan, Marianne, 26 août 16)

28 août 2016

"[...] C’est la grande hypocrisie de cette focalisation sur les porteuses de burkini : ce ne sont que des femmes voilées mouillées. Ce rejet indique que les élites rallient tardivement un refus du voile exprimé par les Français dès son apparition, il y a plus de trente ans. Mais leur argumentation confuse témoigne d’une impuissance : le burkini à la plage et le voile dans la rue ne s’opposent ni à la laïcité, ni aux valeurs de la République, ni aux droits de l’homme, mais à l’esprit français, aux valeurs européennes et autres subtilités culturelles évidentes qui ne réclamaient pas de lois positives. C’est la leçon que beaucoup n’ont pas voulu voir dans la loi de 2010 interdisant la burqa que nombre de journalistes et d’élus présentent à tort comme une « loi de laïcité ». Le législateur avait dû étendre la notion d’« ordre public » à la défense des « mœurs, coutumes et traditions propres à une nation ». L’identité d’une société ne se définit pas seulement par des règles juridiques codifiées, mais par un héritage culturel. En France, les rapports entre les sexes ne datent ni de 1789, ni de 1905, ni de 1945, mais sédimentent une longue histoire commencée avec la lutte de l’Eglise au Moyen Age contre la répudiation et les mariages arrangés, la place des femmes dans la royauté et leur rôle dans les salons des Lumières.

Outil de liberté, la laïcité a réglé un problème de pouvoir entre républicains et ecclésiastiques au sein d’un univers culturel commun. Mais la rhétorique laïque peut être retournée comme un gant au profit de cultures différentes. Les nouveaux censeurs du burkini s’effrayent de découvrir qu’un séparatisme identitaire islamique menace un héritage culturel habituel, mais pas éternel. Il leur faut pousser un peu plus loin leur lucidité retardataire pour accepter deux évidences qu’ils ne veulent pas voir.
D’une part, la progression de cette « contre-société fondée sur l’asservissement de la femme », comme dit Valls, s’oppose au « métissage » et au « vivre-ensemble » qu’ils ne cessent d’implorer à mesure qu’ils se réduisent : le voile est d’abord le signe endogamique du refus de l’échange matrimonial et de l’interdiction pour une musulmane d’épouser un mécréant.
D’ autre part, ce séparatisme identitaire est le fruit du multiculturalisme qu’ils n’ont cessé de promouvoir, du « droit à la différence » de SOS Racisme à la ratification en 2004 (dans le dos des Français, sans débat public) de la prescription bruxelloise définissant l’intégration comme « un processus dynamique à double sens d’acceptation mutuelle de la part de tous les immigrants et résidents des Etats membres ». [...]"

Lire "Le burkini ne s’oppose pas à la laïcité mais à l’esprit français".



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