Revue de presse

"L’Égypte réclame une pénalisation du blasphème" (lefigaro.fr , 19 sept. 12)

22 septembre 2012

"Dans la foulée des manifestations anti­américaines déclenchées par la vidéo islamophobe sur Internet, la pression monte dans les capitales arabes pour exiger une législation internationale sur la diffamation des religions. Cette revendication a rattrapé Laurent Fabius au Caire, où il effectuait mardi la première visite d’un ministre français des Affaires étrangères depuis l’arrivée au pouvoir des Frères musulmans en juin dernier.

La question ultrasensible de l’incrimination du blasphème a été notamment mise sur la table par le grand cheikh d’al-Azhar, avec lequel le chef de la diplomatie française s’est entretenu mardi. À la veille de la venue au Caire du ministre français, la plus haute autorité sunnite avait indiqué qu’elle lui demanderait d’appuyer une démarche à l’ONU. Dans la presse égyptienne, le dignitaire religieux a affirmé que le pays était victime d’un « complot » et dénoncé un « film déstabilisateur pour la paix mondiale ».
Une triple exigence : « amitié, démocratie, stabilité »

Durant sa visite en Égypte, Laurent Fabius a clairement condamné ce film « débile, nul et insultant ». Mais « ce n’était pas une raison pour assassiner un ambassadeur », a-t-il ajouté. L’affaire a révélé, selon lui, une « alliance objective des extrêmes qui prétendent s’opposer mais qui se font la courte échelle » en Occident et dans le monde arabe. Le ministre a indiqué qu’une nouvelle manifestation d’islamistes à Paris, comme celle de samedi dernier, serait « certainement interdite ». [...]

Lors de ses entretiens avec le cheikh d’al-Azhar, M. Fabius a rappelé les réticences de la France, comme de la plupart des pays occidentaux, à pénaliser la diffamation des religions, au nom de la liberté d’expression. Une notion qui « chez nous pose problème », lui a rétorqué son interlocuteur. « Il faut éviter toutes les provocations, lui a répondu le ministre, mais agir ex ante est délicat, car, dans un État laïque, il y a la loi et il y a la foi. C’est aux individus et non aux religions d’être protégés par la loi », a argumenté Laurent Fabius.

Épineux, le problème est aussi un véritable serpent de mer. Il a déjà connu des retours de flamme, comme lors des caricatures de Mahomet en 2005. Les événements de ces derniers jours l’ont remis en lumière. Dans la foulée, la présidence égyptienne, par la voix d’un porte-parole, a réactivé l’idée d’une pénalisation ­internationale du dénigrement des religions. La vague est porteuse : l’opinion publique soutient largement ce projet, convaincue d’être la cible d’une islamophobie croissante de l’Occident. Les Égyptiens, comme d’autres peuples arabes, dénoncent aussi « deux poids deux mesures », arguant que les musulmans seraient moins protégés du blasphème que les juifs de l’antisémitisme ou de la négation de la Shoah. Une des premières initiatives du gouvernement Morsi, dès qu’a éclaté l’affaire de la vidéo islamophobe, a d’ailleurs été de réclamer à Washington une condamnation pénale des auteurs du film.

Le débat agite le Conseil des droits de l’homme de l’ONU depuis une douzaine d’années. En mai 2011, un compromis a été obtenu pour tenter de régler le problème hors de l’enceinte onusienne, donc sans passer par une résolution. Un accord auquel certains irréductibles, comme l’Algérie, continuent de s’opposer, l’Égypte n’y ayant souscrit que mollement. L’onde de choc de ces derniers jours a confirmé qu’elle ne renonçait pas à voir, à terme, le blasphème incriminé."

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