Revue de presse

"Insaisissable Hassan Iquioussen, imam aux deux visages" (La Voix du Nord, 12 août 22)

15 août 2022

[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Depuis l’annonce par Gérald Darmanin de son expulsion – suspendue – du territoire français, le prêcheur Hassan Iquioussen fait couler beaucoup d’encre. Entre mensonges et contre-vérités, difficile de cerner la personnalité de « l’imam des cités ».

Par Laurie Moniez

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Debout derrière « le minbar » (la chaire) de la mosquée de Villeneuve d’Ascq, il fait face à plus de 300 musulmans, assis sur leurs tapis. En ce 23 octobre 2020, Hassan Iquioussen lance aux fidèles depuis son micro : « Nous devons montrer que nous ne sommes pas des imposteurs. Il faut combattre le communautarisme et le séparatisme. L’islam ne peut vivre que s’il vit avec les autres. »

En cette prière spéciale du vendredi, c’est à ce prêcheur issu du Denaisis que le centre islamique a fait appel. Quelques jours plus tôt, Samuel Paty, professeur d’histoire, a été assassiné dans une attaque terroriste islamique. Le conseil français du culte musulman a proposé aux imams d’évoquer cette tragédie. Ce jour-là, il n’y aucune ambiguïté dans le prêche d’Hassan Iquioussen.

Le visage grave, c’est aussi lui qui prend la parole devant 150 personnes réunies à Denain lors d’une marche le 30 août 2016, en hommage au père Hamel, sauvagement assassiné à Saint-Etienne-du-Rouvray. « Certains cherchent à répandre le chaos et la désolation, leur idéologie n’a rien à voir avec l’islam. Battons-nous pour que ça ne recommence pas », dit Iquioussen dans un message d’unité.

Voilà près de 40 ans que ce fils de Marocains, né à Denain en 1964, enchaîne les conférences à travers le monde francophone et l’Afrique subsaharienne. Celui que l’on surnomme le « prêcheur des cités » fait partie de cette première vague d’imams, s’exprimant dans un français parfait, à être intervenu auprès des jeunes dans les années 90. « J’étais jeune militant associatif quand je l’ai rencontré il y a plus de 30 ans, confie Ali Rahni, un de ses proches. À Roubaix, à l’époque, on était noyés dans la drogue. Il nous a réconciliés avec notre identité culturelle, religieuse et politique en expliquant qu’on pouvait être français et de confession musulmane ». Alors conférencier membre de l’UOIF (ex-Union des Organisations Islamiques de France), Hassan Iquioussen prône déjà une vision politique de l’islam.

En 2004, il dérape face à son auditoire. Cette prise de parole est diffusée à travers une cassette intitulée « La Palestine, histoire d’une injustice ». Lui qui enchaine près de 200 conférences annuelles présente publiquement ses excuses pour ses propos antisémites, parmi lesquels : « le peuple juif est ingrat et a besoin d’être régulièrement rappelé à l’ordre ». Après ce tollé médiatique national, la plainte pour provocation à la haine raciale est classée sans suite.

L’imam, proche des Frères musulmans, est par ailleurs épinglé de manière épisodique pour propos homophobes, xénophobes et anti-femmes. Mais aucun procès n’est intenté contre lui et, tous les dix ans, sa demande de renouvellement de carte de séjour est acceptée par l’État français. Jusqu’à cette année et l’annonce par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin de son expulsion du territoire national.

Soufiane Iquioussen, l’un de ses cinq fils, dénonce un « dossier vide » et « un acharnement politique ». « Mon père a évolué. C’est un procédé malhonnête d’aller chercher des propos datés ou tronqués et sortis de leur contexte. Oui c’est un imam rétrograde et conservateur, comme beaucoup de curés ou rabbins, mais s’il y a vraiment des choses à lui reprocher, pourquoi ne pas saisir le Procureur ? »

A cette question, Yohan Senez, l’ex directeur de cabinet de la maire de Denain, pointe le « mécanisme du double discours » du prédicateur. « J’ai fait partie de ceux qui disaient qu’il en faudrait plus, des mecs comme lui, dit-il. La facette du bonhomme que je voyais était celle d’une parole républicaine et progressiste. En réalité, il porte l’idéologie profonde des Frères musulmans qui expliquent aux jeunes musulmans de France qu’ils sont victimes d’une France qui ne veut pas d’eux, qui importent les conflits du Proche et Moyen Orient chez nous et qui leur disent de prendre les armes pour ne pas finir comme les Ouïghours ».

Un « double langage » ? Et sur Youtube, où il compte plus de 176 000 abonnés, « parfois la vérité éclate », estime Yohan Senez. Ali Rahni le défend : « Il s’est excusé pour ses propos maladroits. Il n’est pas antisémite mais quand on est arabe ou musulman, il n’y a pas de pardon. S’ils expulsent Hassan, ils peuvent tous nous expulser ».

À travers son cas, ce sont deux conceptions de la figure et de l’influence du personnage qui s’affrontent. Prochaine étape le 26 août devant le Conseil d’État.

Hassan Iquioussen mis en cause à propos de son patrimoine immobilier

« Épinglé pour location de logements insalubres », « marchand de sommeil », « sans profession mais propriétaire de sept logements insalubres » : pour faire face aux accusations sorties ces derniers jours dans la presse, une page Facebook en soutien au prédicateur vient démonter, une par une, ce que son fils Soufiane qualifie de « fake news ».

Soufiane Iquioussen, qui annonce plus de 5000 témoignages de soutien, en plus de la cagnotte en ligne de plus de 50 000 euros réunis pour les frais de justice, prévient : « Parmi les enseignements de cette épreuve terrible, après le Conseil d’État, on attaquera pour diffamation et ensuite on demandera la nationalité pour notre père, comme il l’a déjà fait à deux reprises, contrairement à ce que dit Darmanin ».

Selon lui, Hassan Iquioussen a acheté des biens avec ses cinq fils et ils se sont « retroussé les manches ». Il possède une maison familiale et des appartements à Lourches mais surtout quatre immeubles à Denain, seul ou avec ses enfants. « On a emprunté aux banques et on s’est spécialisé dans la requalification de l’ancien. Mon père a déjà eu des redressements fiscaux et, sur l’insalubrité, il y a des contrôles réguliers et les remarques ont été prises en compte », dit Soufiane Iquioussen qui précise que 99 % des locataires touchent des APL et que la CAF suit les dossiers.

Sur les logements insalubres de Lourches, ils appartiendraient à la mère d’Hassan Iquioussen. « On appelait ça la maison marocaine : quand les travailleurs marocains venaient travailler dans les mines il y a plus de 40 ans, ma famille les accompagnait »."



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