“Des catholiques contre le Téléthon” (Le Monde, 11 nov. 06)

novembre 2006

Les responsables catholiques du diocèse de Fréjus-Toulon vont-ils conseiller aux fidèles de ne pas participer aux manifestations et au financement du Téléthon des 8 et 9 décembre ? Dans une lettre de la commission bioéthique de ce diocèse, la collecte de fonds pour la recherche contre les maladies génétiques est qualifiée de "grand show médiatique" instaurant une "stratégie eugéniste" par le "tri sélectif des embryons". La commission assure qu’"il n’est plus possible de financer le Téléthon" et que les fidèles devraient réserver leur générosité à une "médecine éthique".

Ce texte a été rédigé en préparation des débats qui se tiendront dans le Var le 18 novembre, lors des assises de l’observatoire sociopolitique diocésain. C’est ce jour-là que l’évêque du diocèse, Mgr Dominique Rey, fera connaître sa position. Pour l’heure, il accueille cette lettre comme un élément du "débat public" qui doit s’accompagner d’"un dialogue franc" avec les responsables de l’Association française de myopathie (AFM) sur la question des embryons humains.

"Lobby scientiste"

L’auteur du texte, Pierre-Olivier Arduin, fustige "une stratégie eugéniste mise en scène de manière triomphale : les "bébéthons" - qui sont sains parce que n’ayant jamais été malades - ne sont que les survivants d’avortements programmés in vitro ou in utero". L’observatoire diocésain explique se placer dans la droite ligne du Saint-Siège et des déclarations du pape Benoît XVI sur la bioéthique.

L’éditorial du dernier numéro de La France catholique, un hebdomadaire qui touche une frange conservatrice de l’Eglise, reprend ces arguments et appelle à boycotter le prochain Téléthon. L’AFM y est accusée d’être devenue "un lobby scientiste performant" ayant notamment poussé le législateur à légaliser la pratique du diagnostic pré-implantatoire (DPI).

Il dénonce aussi le fait que les sommes recueillies aident à financer les travaux du professeur Marc Peschanski, qui a obtenu les premières autorisations de recherche sur les embryons humains. De son côté, la conférence épiscopale a indiqué, jeudi 9 novembre, qu’elle ne s’associait pas à ces démarches.

"Toutes ces initiatives prennent pour cible la pratique du DPI, observe Laurence Tiennot-Herment, présidente de l’AFM. Nous sommes une association laïque de 5 000 adhérents malades ou proches de malades. Nous respectons pleinement les choix individuels, et nous avons (...) toujours inscrit notre action dans le respect des lois en vigueur. Or, le législateur a, dès 1994, autorisé le DPI, qui a commencé à être mis en oeuvre en France en 1999 et qui est pris en charge par la Sécurité sociale. Les personnes qui lancent cet appel au boycott surfent sur la vague du Téléthon pour faire valoir leurs convictions. Pourquoi ne se sont-elles pas exprimées au moment du vote des lois de bioéthique de 1994 et de 2004 ?"

Jean-Yves Nau et Lilian Renard (à Toulon)


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