Revue de presse

"Burkini à Grenoble : Eric Piolle a le droit pour lui" (lopinion.fr , 5 mai 22)

Marie-Amélie Lombard-Latune, journaliste Société à "L’Opinion". 5 mai 2022

[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Hygiène  ? Sécurité  ? Trouble à l’ordre public  ? Les motifs d’interdiction du maillot de bain islamique ne passent guère la rampe des tribunaux

Les faits - Le président d’Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez (LR), a annoncé vouloir couper les subventions de la région à la ville de Grenoble si son maire, Eric Piolle (EELV), persistait à autoriser le burkini dans les piscines municipales.

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Avocats et juristes se penchent déjà sur le sujet. Si le 16 mai, comme elle l’a annoncé, la ville de Grenoble autorise le burkini dans ses piscines, la justice pourrait-elle s’y opposer  ? Sur quel fondement interdire l’accès des bassins à des femmes couvertes de « tenues non près du corps plus [courtes] que la mi-cuisse », pour reprendre la phraséologie officielle grenobloise  ?

L’opposition au maire Eric Piolle (EELV) dénonce la modification du règlement intérieur des piscines inscrite à l’ordre du jour du prochain conseil municipal, et entend manifester son désaccord. « Une instrumentalisation, une manœuvre électoraliste visant à récupérer le vote musulman », dit la députée de l’Isère Emilie Chalas. L’élue LREM reconnaît cependant : « Si on fait un recours, pas sûr qu’on gagnera ».

En l’état du droit, attaquer une telle décision n’est effectivement pas assuré de succès. En 2016, après une épidémie de burkinis sur les plages de la Côte d’Azur, le Conseil d’Etat avait suspendu une série d’arrêtés municipaux visant à interdire le port d’un tel vêtement. Aucun risque avéré d’atteinte à l’ordre public, pas plus à Villeneuve-Loubet qu’à Cagnes-sur-Mer, affirme alors la haute juridiction : une mesure d’interdiction est donc « disproportionnée ». Seul un arrêté est à l’époque validé : celui pris à Sisco (Haute-Corse) mais, dans ce cas, le burkini avait provoqué des affrontements entre communautés sur la place du village…

Depuis, la ville de Rennes, à majorité PS-EELV, a autorisé le maillot de bain intégral dans ses piscines. En revanche, la région Ile-de-France les a interdits dans ses bases nautiques. La pratique semble évoluer, au gré des étiquettes politiques et des pressions exercées par des associations telles Alliance citoyenne dont les militantes ont lancé plusieurs opérations burkini.

Elu d’opposition à Grenoble, Alain Carignon a mandaté un avocat pour se pencher sur le dossier : « Si on a une petite chance, on attaquera le nouveau règlement », assure-t-il.

« Vie en commun ». Les éléments pour étayer un recours ne sont pas légion. L’hygiène et la sécurité  ? Difficile à soutenir, même si certains estiment qu’en cas d’urgence respiratoire ou cardiaque, intervenir sur une femme portant une tunique en lycra serait problématique. Mais les arguments sont vite spécieux. Des juristes préfèrent ne pas biaiser avec des considérations sur l’hygiène et aller sur le terrain de « l’ordre public immatériel », soit « le consensus social qui rend possible la vie en commun, résume Gilles Clavreul, cofondateur du Printemps républicain et préfet. C’est sur cette base qu’avaient été interdits le lancer de nains, au nom de la dignité de la personne humaine, mais aussi les spectacles de Dieudonné ».

Le Conseil des sages de la laïcité, compétent pour l’éducation et le sport auprès du ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer, a également réfléchi au sujet. Dans un document publié mercredi, l’instance fait aussi référence aux « exigences minimales de la vie en commun dans une société démocratique (...) qui peuvent justifier une interdiction au principe de libre manifestation des croyances religieuses dans l’espace public ».

En 2016, alors vice-président du Conseil d’Etat, Jean-Marc Sauvé se méfiait pourtant d’une logique subjective : « Le principe d’égalité entre hommes et femmes est absolu, mais déduire du port d’un maillot de bain une violation de ce principe serait s’engager sur un terrain juridiquement fragile », expliquait-il au Figaro. Les revirements de jurisprudence sont rares au Conseil d’Etat, ils prennent au minimum une décennie."

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