Livre

1984 : "La bataille scolaire" (Marianne toujours ! de Patrick Kessel - extrait)

par Patrick Kessel, cofondateur et président d’honneur du Comité Laïcité République, ancien Grand Maître du Grand Orient de France. 14 février 2022

Patrick Kessel, Marianne toujours ! 50 ans d’engagement laïque et républicain, préface de Gérard Delfau, éd. L’Harmattan, 8 déc. 2021, 34 e.

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Déboussolée par le tournant de la rigueur, la gauche au pouvoir va l’être davantage encore par les tribulations autour du projet Savary, du nom du ministre de l’Éducation de 1981 à 1984, censé créer un "grand service public, unifié et laïque de l’Éducation Nationale". À quelques encablures de l’élection présidentielle, François Mitterrand avait rappelé cet engagement à l’occasion des Assises de la laïcité organisées par le Grand Orient. Un propos qui avait suscité un grand espoir chez les instituteurs, les militants de gauche et tous les laïques. Le candidat avait néanmoins ajouté que ce service public serait "négocié, réalisé sans spoliation ni monopole". Une petite phrase visant à rassurer l’archevêché et qui laissait ouvert le champ des interprétations. À trop ruser, on se trompe soi-même. Ce sera une bérézina.

Le projet Savary prévoit l’insertion du secteur privé en "établissements d’intérêt public" sous le contrôle de l’État. L’enseignement catholique, relayé par l’Église et par la Droite dénonce la "nationalisation" et le "monopole", "desseins masqués" qu’elle prétend discerner, fait-il dire à son porte-parole. Il refuse le dialogue proposé par le ministre et organise la manifestation du 24 juin qui conduira au retrait du projet.

Le projet mécontente également le CNAL (Comité National d’Action laïque), les associations laïques, le Grand Orient, qui attendaient la fin du dualisme scolaire instauré par la loi Debré en 1959. Jean Poperen relaie l’opposition du CNAL. André Laignel dépose des amendements qui ont l’avantage de la clarté. Ils agitent le groupe socialiste. Lionel Jospin, premier secrétaire du PS, est très réservé sur cette "construction aventureuse" [1]. Pourtant, l’ancien député, ancien sénateur, Gérard Delfau, rapporteur spécial de la commission des Finances sur l’enseignement scolaire dit "ne pas se souvenir d’une discussion approfondie dans les instances du parti socialiste durant cette longue crise" [2].

Cette triste épopée offrira à l’opposition une opportunité inespérée de résurrection et au Président, l’occasion de faire la démonstration de ses exceptionnelles qualités manœuvrières. Charles Pasqua, alors président du groupe RPR au Sénat, politicien madré, s’appuyant sur une mobilisation de la droite et de l’Église en faveur de l’école privée, veut le contraindre à un référendum. François Mitterrand, tel un joueur d’échecs chevronné, dégaine la pièce du "référendum sur le référendum" !

De ces jeux politiques, la laïcité qui devait être renforcée sortira affaiblie. Les accords de 1992, dits Lang-Cloupet, signés entre le ministre de l’Éducation Nationale et le secrétaire général de l’enseignement catholique, l’accord Rocard, alors ministre de l’Agriculture, avec l’enseignement agricole catholique en 1984 et enfin les reculades de Lionel Jospin au moment de l’affaire du voile de Creil en rajouteront une couche. "Mitterrand a-t-il laissé se dégrader inexorablement cette affaire pour pouvoir la clore par un coup d’état en faveur du pluralisme ?" s’interrogera Serge July, dans les colonnes de Libération [3]. Une partie de la gauche a - t-elle oublié de se mobiliser ?

L’intention du Président de se débarrasser d’une sacrée épine est vraisemblable, tant l’homme qui se donne des objectifs lointains sait aussi naviguer à vue avec la plus extrême prudence. Il n’a jamais été un militant laïque mais jamais davantage n’en a été un adversaire. Ses écrits témoignent d’une mise à distance du sujet. "La Bible a nourri mon enfance. Huit ans d’internat dans une école libre à St Paul d’Angoulême m’ont formé aux disciplines de l’esprit. Je ne m’en suis pas dépris. J’ai gardé mes attaches, mes goûts et le souvenir de mes maîtres bienveillants et paisibles. Nul ne m’a lavé le cerveau. J’en suis sorti assez libre pour user de ma liberté", écrit-il [4]. "La nationalisation de l’enseignement demandée de longue date par les associations laïques ne figurait pas dans mes options de la campagne présidentielle de 1965 et n’est entrée dans le programme socialiste qu’en 1972", précise-t-il un peu plus tard. "Sans doute les offensives de l’école privée ont-elles poussé la gauche à durcir son attitude", ajoute-t-il, comme s’il voulait excuser le projet des socialistes de créer un grand service public de l’Éducation Nationale.

Le futur Président a pourtant tissé dès 1975 des liens privilégiés avec le mouvement syndical enseignant, base électorale historique de la gauche. André Henri, Guy Georges, Louis Astre, Jean Battut, Clément Durand sont consultés. En 1978, Pierre Bérégovoy, à l’issue d’une réunion avec le Syndicat national des instituteurs, raye dans le communiqué commun le mot "nationalisation" de l’enseignement et le remplace par "décentralisation". Un demi-siècle plus tard, Louis Astre qui était alors un des responsables de la FEN, me confie que "le syndicalisme enseignant a été partiellement instrumentalisé". Louis, dont j’ai été le "potache" au lycée et dont je demeurerai l’ami jusqu’à sa disparition en novembre 2020, me confia que ce fut là "l’acte du renoncement" et qu’"un accord tacite avait été réalisé pour remettre l’unification du service public à plus tard en échange d’intérêts catégoriels". Un renoncement qui, selon lui, vaudrait quasi reconnaissance de la loi Debré sur les financements publics aux écoles privées.

De fait, certains à gauche considèreront l’abrogation de la loi Debré comme un sujet dépassé sur lequel il ne serait plus possible de revenir. Position qu’au tard de sa vie défendait Guy Georges, autre figure légendaire de cette bataille de l’école, secrétaire général du Syndicat national de instituteurs et professeurs de collège dont l’école fondamentale constituait la priorité. L’année précédant son élection à la Présidence de la République, voulant rassurer l’Église et le centre chrétien, François Mitterrand se déclare opposé au monopole et en faveur d’un contrat négocié pour l’intégration des écoles privées dans le service public [5]. Le même homme, voulant tranquilliser cette fois l’aile laïque de ses soutiens, reprend à son compte le mot d’ordre de la gauche, "les fonds publics à l’école publique, les fonds privés à l’école privée" [6]. C’est dans cet espace d’ambivalence que va s’installer la controverse, l’Église, la droite, mais aussi une petite partie de la gauche laissant croire que le pouvoir veut en finir avec l’enseignement privé et imposer une dictature d’État sur les consciences !

Cette faculté toute byzantine du Président à gérer les rapports de force ne saurait disculper le camp laïque de son immense responsabilité devant cet échec historique. Jacques Pommateau en convenait au lendemain de ces évènements, qui déclarait que "depuis 1958, le CNAL n’a plus jamais été en mesure de faire passer quelque chose vis à vis de l’opinion publique" [7]. La gauche était-elle toujours majoritairement désireuse d’en revenir à la stricte application de la loi de séparation ou bien avait-elle déjà pratiqué, sans le dire, un Bad Godesberg philosophique sur le dos de la laïcité ?

La laïcité : une histoire française

Fondement de la liberté de conscience, fille des Lumières, si chère à Condorcet, la laïcité est portée en politique par le parti radical qui, à ses plus belles heures, se fait le bras armé du Grand Orient. Un parti, celui de Gambetta et du "programme de Belleville" de 1869, qui fait notamment voter les lois de 1881 et 1882 instituant l’école primaire gratuite laïque et obligatoire et la loi du 3 juillet 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État. Qui, en 1924, au sein du Cartel des gauches, s’engage à intégrer au droit commun de la République l’Alsace-Lorraine soumise au concordat de 1801. Un parti qui, l’année suivante, mobilise les républicains lorsque la Fédération nationale catholique du général de Castelnau appelle toutes les régions de France à pratiquer "l’adoration due au vrai dieu et à livrer ouvertement et unanimement la guerre au laïcisme" [8].

C’était une époque où la gauche était laïque et la droite cléricale. Où la gauche était de gauche et la droite de droite. La laïcité au service de l’émancipation et de la justice sociale qui constituaient les piliers de sa culture. La guerre d’Espagne conforte cet affrontement entre les républicains laïques et l’Église engagée aux côtés de la dictature franquiste. En France, après le Cartel des Gauches, le Front Populaire est fidèle à cette tradition. Léon Blum nomme Jean Zay au ministère de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts, qui mène un audacieux projet de réforme du système éducatif et, par des circulaires, confirme l’interdiction des signes religieux dans l’enseignement. Ce que Lionel Jospin, Premier Ministre, n’osera pas faire en 1989 au tout début de l’affaire du voile de Creil.

Frère du Grand Orient, Jean Zay est assassiné en juin 1944, par des miliciens aux ordres du régime de Vichy qui fit adopter le principe du financement public des écoles privées. C’est en revanche le programme du Conseil de la Résistance, voté en mars 1944, qui rétablit la pleine liberté de pensée, de conscience et d’expression, et l’égalité absolue de tous les citoyens devant la loi. Le mouvement de balancier se perpétue, la gauche et la droite s’inscrivant dans leur tradition.

Les choses se gâtent dans l’après-guerre. La question scolaire fait éclater les tentatives de Tripartisme du début de la IVème république. Le MRP (Mouvement républicain populaire), parti démocrate-chrétien qui a fait élire l’abbé Pierre à l’Assemblée Nationale, entre en conflit avec les autres partis, radicaux, SFIO et PCF sur la question de la laïcité. L’Église n’a rien abandonné de son hostilité à la laïcité et entend petit à petit reconquérir le terrain perdu. Et renforcer le dualisme scolaire. Elle parvient à faire voter les lois Marie (octroi de bourses aux élèves du privé) et Barangé qui ouvrent une brèche dans l’interdiction des financements publics aux écoles privées. L’évêque de Lyon incite les parents d’élèves des écoles confessionnelles à différer le paiement de leurs impôts.

La partie de bras de fer se poursuit. En 1956, la SFIO persiste et signe et inscrit dans son programme la nationalisation de l’école privée. Dirigeants et militants n’ont pas honte de s’afficher anticléricaux. Cela n’empêche pas Guy Mollet, dirigeant du parti socialiste, président du Conseil, d’entreprendre des négociations secrètes avec le Vatican. Il propose notamment une allocation familiale scolaire pour tous les enfants, quelle que soit l’école fréquentée, ce qui revient à financer l’école privée. Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais !

La droite étendra le financement public des écoles privées avec les lois Debré et Germeur. C’est là son leitmotiv depuis la Libération, avancer par petits pas pour contourner la loi de 1905 et l’interdiction faite à l’État de reconnaître, de salarier et de subventionner les cultes. Elle va s’arc-bouter contre le projet de "grand service public de l’Éducation Nationale", faisant croire qu’il s’agit de nationaliser l’enseignement confessionnel et d’instaurer un monopole d’État sur les consciences. Pourtant Jaurès avait souligné que le monopole entre les mains de l’État serait périlleux et Condorcet avait écrit qu’il convenait que le gouvernement n’ait jamais aucune influence sur les choses qui sont enseignées. Le projet de la Gauche visait non à interdire l’enseignement privé mais, comme le prévoit la loi de séparation, à réserver les financements publics à l’enseignement public. Le projet allait échouer lamentablement.

L’Église a-t-elle émis le souhait de négocier officiellement le projet de réforme ? De nombreux contacts ont eu lieu en amont. En pleine crise, le Comité National de l’enseignement catholique opposera deux refus successifs et catégoriques aux offres de négociation du ministre Savary les 21 décembre 1982 et 9 janvier 1983 [9]. Henri Madelin, Provincial de France de la Compagnie de Jésus, déclare "s’il faut passer par les fourches caudines de la laïcité, au sens étroit, on ne peut pas être d’accord." [10] Et tandis que la motion de censure de l’opposition est rejetée après que le Premier ministre, Pierre Mauroy a engagé le 49-3 [11], Mgr Vilnet, le Président de l’épiscopat, appelle à la mobilisation. L’archevêque de Paris menace le gouvernement, s’il "refusait de renégocier les points litigieux, de réactions très dures".

Alain Savary, compagnon de la Libération, ancien premier secrétaire du parti socialiste, ministre de l’Éducation Nationale favorable à un compromis, estime qu’"il s’agit, non de supprimer le dualisme scolaire, mais de le réduire" [12]. Dans le sens inverse, André Laignel, député socialiste, président de la commission spéciale, qui estime que l’argent public doit aller l’école publique, déclare que "le projet ne contribue pas au rapprochement et donc pas à l’unification progressive du système éducatif." Bataille d’amendements. C’est l’impasse. La droite, abattue par sa défaite en 1981, après avoir échoué à empêcher les nationalisations, tient enfin une occasion inespérée de refaire surface et de menacer le gouvernement. Avec l’Église, elle mobilise en vue de la grande manifestation du 24 juin 1984. Ça tangue !

François Mitterrand annonce le retrait du projet qu’il trouvait pourtant bon quelques jours plus tôt à l’occasion de son intervention du 14 juillet à la télévision. Depuis, le rapport de force a changé. Le 17 juillet le ministre Savary présente sa démission du gouvernement, suivie de celle de Pierre Mauroy. Tous deux ont appris le retrait du projet à l’occasion de l’intervention télévisée du Président. Le soir Laurent Fabius est nommé Premier Ministre. Le Président a-t-il tiré les leçons politiques pour sauver sa majorité ou bien s’est-il saisi de la situation pour abandonner un projet auquel il ne croyait pas trop ?

Le Projet Savary et le Grand Orient

Paul Gourdot qui vient de succéder à Roger Leray à la Grande Maîtrise du Grand Orient, dès le début de son mandat, prend contact avec l’Élysée pour rappeler l’importance fondamentale que le Grand Orient accorde à la laïcité. Dans un courrier de novembre 1981 à Alain Savary, il met en avant la demande d’abrogation des lois anti-laïques, la loi Debré en particulier. En réponse, le ministre prend acte de la résolution du Grand Orient et annonce l’ouverture prochaine de négociations en vue de la mise en place d’un Grand Service public, laïc et unifié de l’Éducation Nationale. En juin 1982, le Grand Orient et la FEN réitèrent ensemble leur détermination à la mise en place sans tarder de cette réforme, inscrite dans le programme de la gauche et dans sa culture depuis des lustres.

Il y aurait beaucoup à dire sur les raisons du fiasco final. Sur les divisions syndicales, les affrontements personnels dont la mémoire demeure vive près de quarante après. Sur les tergiversations au sein de la majorité parlementaire, au sein du gouvernement, au sommet de l’État. Sur les hommes. Des Frères de centre-droit ont ainsi rejoint le cortège des partisans de l’enseignement privé, le 24 juin 1984. D’autres francs-maçons du Grand Orient, plus nombreux, tel André Laignel, député, rapporteur à l’Assemblée sur le projet de loi, se battent au contraire jusqu’au bout pour faire aboutir la réforme, sans qu’elle soit vidée de sa substance. L’homme, cela lui sera assez reproché, n’est pas de nature à céder aux pressions, à gérer sa carrière, à s’autocensurer. Il est déterminé à servir ses idées et a parfois recours à des formules tranchantes comme cette fameuse apostrophe à Jean Foyer, député de droite qui défend l’exception d’irrecevabilité à la loi Savary : "Vous avez juridiquement tort parce que vous êtes politiquement minoritaire." L’homme est courageux, pugnace, déterminé. J’accepterai avec plaisir d’entrer dans son cabinet ministériel quelques années plus tard, en charge de sa communication.

Paul Gourdot, socialiste lui-même, mais plus proche de Michel Rocard que de François Mitterrand, qui se dit proudhonien plutôt que marxiste, mène la bataille avec détermination. L’homme est connu pour sa grande fermeté sur les principes républicains en général et la laïcité en particulier. Il va marquer une plus grande indépendance que son prédécesseur à l’égard du pouvoir présidentiel. Fin 1982, il adresse une lettre au Président de la République qui demeure une pièce d’anthologie par sa ténacité. "Les francs-maçons du Grand Orient de France sont inquiets des lacunes ou des manquements aux dispositions constitutionnelles, notamment concernant la laïcité de l’État considérée comme l’éthique fondamentale de la société. Les propositions du gouvernement ne sont pas de nature à nous rassurer, en dépit des déclarations de M. Savary, car notre conception de l’école laïque exclut toute possibilité de dualisme au sein du service public", écrit-il. Il en appelle à la construction d’un grand service unifié et laïque d’éducation par l’intégration des établissements scolaires qui ne pourraient continuer à bénéficier de l’aide de l’État qu’en perdant leurs caractères propres.

Le nouveau Grand-Maître ne ménage pas sa peine. Mais la ténacité de Paul Gourdot ne suffit pas à mettre un terme à l’offensive qui se dessine contre la laïcité. Certains mettront en doute la volonté de François Mitterrand de faire aboutir la réforme. Pierre Mauroy aurait caressé le projet d’un grand rassemblement laïque pour répondre à la manifestation de la droite et de l’Église. Mais "l’intention aurait fait frémir l’Élysée", selon Thierry Pfister, conseiller du Premier Ministre [13]. Au contraire, Michel Charasse, conseiller du Président avant d’entrer au Conseil Constitutionnel, estimait que "les laïques n’ont pas su mobiliser leurs forces comme l’Église a su le faire" ! Et pour tout dire, avec ses mots souvent choisis pour être provoquants, "les laïques se sont dégonflés". À tout le moins, ils se sont divisés. L’affaire a révélé des divergences profondes au sein de la famille laïque et va fragiliser durablement la laïcité que nous imaginions gravée dans le marbre de la République. L’offensive qui allait se déployer les années suivantes autour de la "laïcité nouvelle" y plonge ses racines.

Forte de cet échec, qui ouvre de fait la voie à l’élargissement du financement public à l’enseignement privé, l’Église adopte une stratégie subtile. Il ne s’agit plus de s’opposer frontalement à la laïcité mais, par touches successives, de la vider de son contenu. Ainsi, lors de colloques et de débats divers, plus tard au sein de l’Observatoire de la laïcité présidé par Jean-Louis Bianco, des voix autorisées défendront que liberté de conscience et liberté religieuse seraient équivalentes. La loi de 1905, dans son article premier, précise pourtant que "la République assure la liberté de conscience et garantit la liberté de cultes, ce qui est pour le moins différent". Le dualisme scolaire étant de fait reconnu, il n’est plus prioritaire pour l’Église d’abroger la loi de séparation de 1905. Il suffit, par une politique des "petits pas" de la contourner pour obtenir un élargissement des financements aux écoles cultuelles. Et l’idée d’un élargissement du concordat, aujourd’hui limité à l’Alsace-Moselle et à la Guyane, ressurgit de temps à autre des oubliettes. Cette stratégie réussira pleinement avec le concours du Conseil d’État dont les interprétations de plus en plus libérales fragiliseront l’application de la loi de séparation. Elle trouvera le soutien d’intellectuels de gauche qui, prétendant promouvoir un droit à la différence, vont nourrir le communautarisme et s’attaquer à la laïcité.

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[1Déclaration le 24 juillet 1984, Je crois à la politique, Gérard Delfau et Martine Charrier, L’Harmattan, 2020, p. 574.

[2Gérard Delfau, op cit., p. 575.

[3Serge July, Les années Mitterrand, Grasset, 1986, p. 37.

[4François Mitterrand, Ici et Maintenant, Fayard, p.16.

[5François Mitterrand, Ici et Maintenant, op.cit., p. 553.

[6François Mitterrand, L’abeille et l’architecte, Flammarion, 1978, p. 257.

[7Libération, 5 mars 1984.

[8Cité dans Joseph Caillaux, Jean-Denis Bredin, Folio Histoire, p. 321.

[9Clément Durand, Du ciel sur la terre, Sudel,1991.

[10Henri Madelin, interview au Monde, 28 décembre 1982.

[11Article 49-3 : dispositif qui permet à un gouvernement en engageant sa responsabilité de faire adopter une loi sans la soumettre au vote du Parlement. Souvent qualifié de passage en force par l’opposition, il fut utilisé une petite centaine de fois, tous gouvernements confondus depuis 1958, fondation de la Vème République.

[12Clément Durand, Du ciel sur la terre, op. cit.

[13Thierry Pfister, À Matignon au temps de la gauche, Hachette, 1985.



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