Revue de presse

"Québec, le faux paradis des communautarismes religieux" (D. Benhabib, Marianne, 29 av. 16)

Djemila Benhabib , journaliste et essayiste, Prix international de la laïcité 2012, auteur de "Après Charlie. Laïques de tous les pays, mobilisez-vous !" (H&O). 8 mai 2016

"L’école maternelle du quartier Saint-Michel de Montréal ressemble à n’importe quelle école maternelle. Dans cet établissement public, les enfants dessinent, s’appliquent, chahutent leurs camarades, tournicotent sur les petits bancs de bois, apprennent la vie en collectivité, chantent, tapent des mains... Enfin... Tous, sauf exception. En décembre 2011, les parents d’une petite fille scolarisée dans l’établissement - deux musulmans ultrapratiquants - ont exigé de l’administration qu’elle cesse de « contraindre » leur bambine à écouter de la musique ou à chanter, au motif que l’un et l’autre étaient « haram » (« impur ») dans leur religion.

Exigence délirante ? Requête incongrue ? Vous n’y êtes pas : plutôt que de renvoyer ces « parents-talibans » au respect de la règle commune, la direction de l’école a considéré qu’elle ne voyait aucun problème à doter la jeune élève d’un casque antibruit à chaque fois que ses chastes oreilles pourraient être polluées par la mécréante mélopée d’une comptine pour enfants ou par l’impureté d’un morceau de flûte à bec. Egarement d’une directrice très coulante ? Acrobatie administrative en solo ? Vous n’y êtes - toujours ! - pas : interrogée sur cette décision, la ministre de l’Education de l’époque, Line Beauchamp, déclara qu’elle n’y trouvait rien à redire : « S’il ne brime pas les autres enfants, qu’il vise l’intégration [sic !] et qu’il n’impose pas de compromis sur le plan pédagogique, un accommodement raisonnable peut être toléré », a-t-elle décrété. [...]

C’est en 1985 que la notion d’accommodement raisonnable a vu le jour. La Cour suprême du Canada - le plus haut tribunal du pays - statuait sur le cas de la salariée d’un magasin de vente au détail qui, après quelques années de bons et loyaux services, avait adhéré à l’Eglise adventiste du septième jour, et demandé dans la foulée à son employeur qu’il l’exemptât désormais de travail le jour du shabbat, comme le prescrivait sa nouvelle religion. Son patron avait obtempéré, mais en requalifiant au passage son statut d’« employée à plein temps » en « employée occasionnelle ». C’est alors que la récente convertie avait porté plainte, se disant victime d’une discrimination fondée sur ses croyances. Au terme d’une procédure juridique de sept ans, la Cour suprême lui donna raison. La notion d’accommodement raisonnable était née. [...]"

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