Revue de presse

"Les écoles confessionnelles hors contrat dans le viseur de l’éducation nationale" (Le Monde, 8 av. 16)

7 avril 2016

"Vingt inspections surprises ont relevé principalement des faiblesses pédagogiques.

[...] Ce 6 avril au matin, Najat Vallaud-Belkacem a braqué les projecteurs sur les 300 établissements confessionnels (sur 1 300 structures hors contrat) recensés en France, et parmi eux, sur la quarantaine d’écoles se revendiquant comme musulmanes, en déclarant sur France 2 : " Je me demande s’il n’est pas venu le temps, compte tenu des risques de radicalisation auxquels nous sommes confrontés, de passer peut-être d’un système de déclaration - pour ouvrir ces écoles - à un système de contrôle a priori, c’est-à-dire d’autorisation. "

Au lendemain de la tirade de Manuel Valls sur le salafisme, et alors que plusieurs conceptions de la laïcité s’affrontent dans le débat public, faut-il voir là l’" alignement " d’une institution, l’éducation nationale, que la droite dénonce comme " laxiste ", sur une " ligne " plus dure défendue par Matignon ? " On n’est pas dans la suspicion, encore moins dans la stigmatisation, mais on ne veut pas non plus être les ravis de la classe ", répond-on rue de Grenelle, en soulignant que ce projet de " cadrage accru " a émergé à l’automne 2014. Bien avant la série d’attentats, en somme. " Cette vigilance, que le contexte actuel rend plus légitime encore, porte sur toutes les écoles confessionnelles hors contrat, musulmanes, catholiques, évangéliques, protestantes, juives ", martèle-t-on dans l’entourage de la ministre, en réponse sans doute à la " une " du Figaro mercredi, titrée " Les écoles musulmanes inquiètent le gouvernement ".

Pour justifier ce tour de vis – " à inscrire dans la loi dès que les arbitrages interministériels seront rendus " –, une série d’inspections surprises ont été menées, entre novembre 2015 et janvier 2016, dans une vingtaine d’établissements signalés comme problématiques. Vingt structures – dont une dizaine de musulmanes – ont fait l’objet de " visites renforcées " dans sept académies. Verdict : huit d’entre elles (pas toutes musulmanes), si elles n’infléchissent pas leur niveau, leurs pratiques, pourraient être fermées après une deuxième série d’inspections… qui vient de démarrer.

Quelles pratiques ? Les rapports d’inspection, s’ils ne pointent pas de risques de radicalisation, insistent sur les faiblesses pédagogiques et sur les limites posées à la liberté de penser des élèves. " Les apprentissages scolaires mais aussi l’émancipation des enfants y semblent très aléatoires, résume un conseiller ministériel. Des enseignements – sciences, langues, EPS… – peuvent être très lacunaires. Il ne faut ni le surinterpréter ni le minorer. "

C’est telle école où, " malgré un projet qui se veut ambitieux, l’enseignement est jugé inadapté ou insuffisant ". Telle autre où en dépit d’" enfants souriants ", les enseignements – notamment de langue arabe – ont semblé de piètre qualité, voire obsolètes. " La bonne volonté des personnels rencontrés relève de l’affichage ", conclut les inspecteurs.

Des conclusions peu éloignées, somme toute, de celles du SIEN-UNSA, principal syndicat d’inspecteurs. " On craint souvent la dérive sectaire, mais ce sont des problèmes d’ordre pédagogique qui se posent, explique Patrick Roumagnac, son porte-parole. L’inspecteur revient tous les deux, trois ans. Mais est-il à même d’identifier des signes de radicalisation ? J’en doute. " Pour M. Roumagnac, ce risque est plutôt à rechercher dans l’" école à la maison " qui, de source ministérielle, concernait 18 000 enfants en 2011. " Une école musulmane qui cherche à ouvrir ses portes doit montrer patte blanche ", dit-il.

Makhlouf Mamèche, président de la Fédération nationale de l’enseignement privé musulman, n’accueille pas défavorablement le projet de la ministre : " Dans la mesure où les nouvelles dispositions concerneraient tout le monde et pas seulement les établissements musulmans, je n’ai pas d’objection. L’autorisation préalable peut-être une démarche plus claire. "

Du côté des enseignants du public, le SE-UNSA s’en réjouit. " Après avoir trop longtemps traité ce sujet comme quantité négligeable – et c’est vrai qu’il ne concerne que très peu d’élèves –, il n’est pas absurde, dans la société qui est la nôtre, de poser un cadre ", affirme son porte-parole Christian Chevalier.

Quel cadre ? " La loi édicterait des motifs pour lesquels l’Etat peut refuser une ouverture d’école, avance-t-on rue de Grenelle. L’hygiène, la salubrité, mais aussi la qualité pédagogique, la capacité à atteindre le socle commun, le respect des valeurs de la République. " Rien à voir avec la simple déclaration d’ouverture qui, à ce jour, doit être faite en mairie et auprès des services académiques. [...]"

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