Revue de presse

"Le casse-tête juridique de la reconnaissance des langues régionales" (lemonde.fr , 14 jan. 14)

15 janvier 2014

"Entamé il y a plus de vingt ans, le processus n’a jamais eu autant de chances d’aboutir. La ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires, maintes fois repoussée, pourrait enfin devenir réalité en France, grâce à une proposition de loi constitutionnelle examinée en commission des lois de l’Assemblée nationale, à partir de mardi 14 janvier.

Adoptée en 1992 et entrée en vigueur en 1998, cette charte qui vise à protéger les langues régionales et des minorités en Europe a déjà été ratifiée par la plupart des pays européens. La France, de par le poids de ses institutions jacobines, fait encore figure d’exception, mais François Hollande s’était engagé pendant la campagne à la faire rentrer dans le rang. Le 13 décembre 2013, le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a profité de la crise des « bonnets rouges » pour mettre en route cet engagement du candidat Hollande, numéro 56.

Si le rapporteur du texte, Jean-Jacques Urvoas (PS, Finistère), se félicite aujourd’hui de n’avoir « jamais été aussi près de ratifier la charte », il reconnaît : « Nous avons sédimenté les contraintes pour aboutir à une loi peu lisible. » Car les législateurs ont dû manœuvrer pour contourner l’obstacle mis au jour en 1999 par le Conseil constitutionnel, qui avait alors bloqué le processus ouvert par Lionel Jospin ; les juges constitutionnels avaient estimé que cette charte « porte atteinte aux principes constitutionnels d’indivisibilité de la République ».

Il a donc fallu cette fois « sécuriser » la proposition de loi, en y ajoutant deux restrictions « visant à contourner la décision du Conseil constitutionnel », comme l’explique M. Urvoas. Soit, en d’autres termes, écrire dans la Constitution que l’application de la charte n’entre pas en conflit avec ladite Constitution… Un gymkhana juridique, qui pour les uns protège, mais pour d’autres, comme l’écologiste Paul Molac (Morbihan) « pourrait se retourner contre les langues régionales ». [...]

S’il est adopté par les députés, le texte devra ensuite être voté dans les mêmes termes par le Sénat puis, proposition de loi constitutionnelle oblige, être adopté par référendum. Sauf si le gouvernement le reprend à son compte en le transformant en projet de loi, ce qui lui permettrait de le faire voter par les trois cinquièmes du Parlement réunis en Congrès. Telle serait en tout cas son intention, à en croire M. Urvoas, certain qu’un Congrès se tiendra avant 2017 et permettra, enfin, la ratification de la charte."

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