Comité Laïcité République Lorraine

“La laïcité et la loi de 1905” (Metz et Nancy, 25 et 26 nov. 05) : intervention de Jacques Lafouge (CLR)

2005

« République et Laïcité : la longue marche de la notion de la laïcité et les dangers actuels et futurs »

Rappels brefs

La Laïcité est une affaire de morale d’Etat (il en reste si peu !)

L’état reconnaît la liberté absolue de conscience en matière de croyance.

Il lui importe peu que le citoyen ait une religion, n’en ait pas, en change.

Il garantit le libre exercice des cultes pour ceux qui en pratiquent un.

L’état est neutre à l’égard de toutes les croyances et de tous les cultes.

Il ne reconnaît ( ne connaît ?) , n’en subventionne, n’en salarie aucun.

L’état veille à ce que cette liberté d’exercice de tous les cultes soit conforme aux Droits de l’Homme, mais cela il ne l’a jamais dit.

La Laïcité est une part importante de la Liberté garantie aux Citoyens.

Deux principes simples

1 – La Constitution du 4 -10- 1958

« Titre 1er – De la souveraineté

Art. 2 – La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. »

Tout est dit, sauf qu’il n’y a pas de définition de la Laïcité, ni d’ailleurs de la Démocratie ou du social.

De ce point de vue des amendements à la Constitution sur ces thèmes deviennent de plus en plus indispensables.

2 – La Loi du 9 – 12 – 1905

« Titre 1er – Principes

Art. 1er – La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.

Art. 2 – La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence à partir du 1er Janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimés des budgets de l’état, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l’exercice des cultes.
De nouveau tout est dit sauf qu’un certain nombre de nos élus n’ont visiblement qu’une idée très vague des lois de la République. »

Conclusion de tout ceci :

Liberté de conscience et respect de toutes les croyances (ce qui va poser le problème des sectes).

Mais

Pas de reconnaissance, de salaire ni de subvention pour les cultes.

Mais avant

La Constitution du 19 – 04 – 1946

« Art. 13.- Nul ne peut être inquiété en raison de ses origines, de ses opinions ou croyances en matière religieuse, philosophiques ou politiques.
La liberté de conscience et des cultes est garantie par la neutralité de l’état à l’égard de toutes les croyances et de tous les cultes. Elle est garantie notamment par la séparation des églises et de l’état, ainsi que par la laïcité des pouvoirs et de l’enseignement public. »

La Commune de Paris le 3 –4 – 1871

« Considérant que le premier des principes de la République française est la liberté ;

Considérant que la liberté de conscience est la première des libertés ;

Considérant que le budget des cultes est contraire au principe puisqu’il impose les citoyens contre leur propre foi ;

Considérant, en fait, que le clergé a été le complice des crimes de la monarchie contre la liberté,

Décrète :

Art. 1er. L’église est séparée de l’état.

Art. 2. Le budget des cultes est supprimé.

Art. 3. Les biens dits de mainmorte, appartenant aux congrégations religieuses, meubles et immeubles, sont déclarés propriété nationale.

Art. 4. Une enquête sera faite immédiatement sur ces biens, pour en constater la nature et les mettre à la disposition de la Nation. »

Ces dispositions figuraient dans le « programme de Belleville » des républicains en 1869

Observons que les lois constitutionnelles de la IIIe République, puisque la IIIe République n’a jamais eu de Constitution n’ont jamais fait mention de la Laïcité, et pour cause. Ce qui signifie qu’on peut vivre sans Constitution et la IIIe République a été glorieuse. L’Europe pourrait s’en souvenir, mais on n’abordera pas ce sujet.

La séparation entre l’église et l’état remontait en fait à 1789 et à la Déclaration des Droits de l’Homme du 26 – 8 – 1789 qui en ouvrant la porte à des temps nouveaux sanctionnait le divorce entre la Nation, la royauté et l’église.

Ceci se traduisit par des textes :

« Décret du 3 Ventôse An III : La République ne salarie aucun culte.

Loi du 7 Vendémiaire An IV : Prohibition des manifestations extérieures de la religion.

Le Directoire ne fournit aucun local pour l’exercice d’un culte ou le logement de ses ministres. »

Dans l’esprit c’était déjà la Loi de 1905. A quelques années près ne faudrait-il pas commémorer le bicentenaire de la séparation des églises et de l’état ?

On pourrait aller plus loin. Par exemple jusqu’à Guillaume d’Ockham qui, déjà dans les années 1300 condamnait les deux despotismes civil et religieux ce qui lui causa d’ailleurs de graves ennuis.

Mais restons en aux Lumières.

C’est en effet au XVIIIe siècle qu’avait été pris le tournant décisif. Les réflexions des philosophes de ce siècle des Lumières les amenèrent à prendre position contre l’absolutisme royal et religieux. Pendant des siècles on avait considéré la personne du roi comme inviolable du fait du caractère religieux et sacramentel de son sacre. Lorsque les Philosophes dirent et écrivirent que le roi tient son pouvoir du Peuple ils mirent fondamentalement en cause l’ancien régime et ouvrirent la porte à un changement radical.

Lorsqu’ils dénoncèrent l’exigence de l’église catholique d’assumer ou de guider le pouvoir politique, lorsqu’avec Voltaire ils dirent qu’il fallait écraser l’infâme ils ouvrirent la porte à ce qui deviendrait la Laïcité.

Infâme était-il exagéré ? Mais pouvait-on supporter plus longtemps que le chevalier de la Barre soit brûlé pour n’avoir pas salué une procession ou Calas d’avoir été accusé sans preuves d’avoir assassiné son fils qui aurait voulu paraît-il se convertir au catholicisme, et bien d’autres excès.

C’est ainsi qu’au XVIIIe siècle les esprits allaient vers la République et la Laïcité même si dans l’instant ces mots n’étaient pas prononcés puisqu’on pensait plus tôt à une monarchie parlementaire sur le modèle anglais mais débarassée de la pesanteur religieuse.

Que Diderot, d’Alembert, Condorcet, Voltaire et tous les autres en soient remerciés.

La longue marche

Le passage du principe de Laïcité dans les textes de loi a nécessité sous la IIIe République 36 ans d’efforts :

1869 : La séparation de l’église et de l’état figure dans le programme dit de Belleville des républicains.

3-4-1871 : La Commune décide de la séparation de l’église et de l’état.

30-7-1875 : Un député évoque à l’Assemblée le comportement du clergé.

25-11-1876 : Demande de suppression du budget des cultes.

30-7-1879 : Proposition à l’Assemblée d’abrogation du Concordat.

8-5-1880 : Rapport à l’Assemblée tendant à l’abrogation du Concordat.

17-11-1881 : Reprise de la proposition tendant à l’abrogation du Concordat.

11-2-1882 : Proposition de séparation de l’église et de l’état et de sécularisation des biens du clergé.

1-3-1882 : Fondation de la Ligue nationale pour la séparation de l’église et de l’état.

7-3-1882 : Discussion à l’Assemblée d’une proposition de loi tendant à l’abrogation du Concordat.

31-5-1883 : Examen d’une proposition de loi sur l’abrogation du Concordat, la sécularisation des bien du clergé, l’exercice public du culte catholique en France et les garanties du pouvoir civil vis à vis du pouvoir des évêques sur le clergé.

24-4-1888 : Création d’une commission d’étude des lois sur les rapports de l’église et de l’état et sur l’abrogation du Concordat.

27-6-1902 : Proposition de loi tendant à la suppression du budget des cultes.

20-10-1902 : Proposition de loi tendant à la séparation de l’église et de l’état.

7-3-0903 : Proposition de loi tendant à la séparation de l’église et de l’état, à la dénonciation du Concordat et à la suppression du budget des cultes.

17-5-1903 : Tenue de plus de mille réunions en France pour réclamer la séparation de l’église et de l’état et ce à l’initiative de l’Association nationale des Libres Penseurs.

26-5-1903 : Proposition de loi tendant à la séparation de l’église et se l’état.

9-6-1903 : Proposition de loi pour établir la liberté de conscience et des cultes et l’affranchissement de l’état vis à vis des églises.

11-6-1903 : Proposition de loi sur la séparation de l’église et de l’état.

16-6-1903 : Création d’une commission parlementaire sur le sujet.

25-6-1903 : Proposition de loi sur la séparation de l’église et de l’état.

26-6-1903 : Proposition de loi sur la liberté des cultes et la séparation de l’église et de l’état.

30-7-1904 : Rupture des relations diplomatiques avec le Vatican.

4-9-1904 : A Auxerre Emile Combes déclare que le vote de la loi de séparation est inéluctable.

10-11-1904 : Projet de loi présenté au Parlement par Emile Combes.

31-1-1905 : Proposition de loi sur la séparation de l’église et de l’état et la suppression du budget des cultes.

3-7-1905 : Adoption du projet par la Chambre.

9-11-1905 : Débat au Sénat.

9-12-1905 : Proclamation de la Loi sur la séparation des églises et de l’état.

24-12-1905 : Banquet républicain sur la séparation des églises et de l’état.

Ce qu’il faut en retenir :

  • L’attitude antirépublicaine du clergé.
  • Il a fallu 17 projets de loi pour arriver à la séparation
  • Le combat a duré 36 ans
  • L’attitude méfiante du pape Léon XIII qui déclare : » L’église n’est liée à aucune forme de gouvernement ; accepter la République n’est pas accepter une législation hostile à la religion. » (Encyclique « Au milieu des vicissitudes »).
  • Action de la Libre Pensée et de la Franc-Maçonnerie
  • Rupture des relations diplomatiques avec le Vatican
  • Ce n’est qu’en 1905 que la formule : séparation des églises apparaît, alors que jusque là on ne parlait que de l’église.

L’œuvre législative avant la Loi de 1905

Tout se passe comme si la Laïcité était un fait acquis :

24-2-1879 : La Marseillaise devient l’hymne national

9-8-1880 : Organisation des écoles normales pour former des enseignants républicains

19-6-1881 : Gratuité de l’enseignement

28-3-1882 : Etablissement de l’instruction obligatoire et laïque

27-7-1884 : Loi autorisant le divorce

14-8-1884 : Suppression des prières publiques aux sessions parlementaires

30-10-1886 : Laïcisation du personnel enseignant de l’enseignement public

1-7-1901 : Loi sur les associations

A coup sûr aucune de ces dispositions législatives n’ont dû plaire à l’église catholique. Elles ont pourtant modifié profondément l’état de la société et illustré par l’exemple la nécessité de la rupture avec l’église.

Dangers actuels et futurs

Notre République n’a jamais été complètement laïque et menace de l’être de moins en moins au fil des jours parce qu’il y a :

  • Des atteintes journalières qui restent le plus souvent sans réaction de la part des laïques.
  • Des portions du territoire national où la Laïcité n’a jamais été appliquée.
  • Parce que la Laïcité est attaquée sur le plan fiscal.
  • Parce que le délit de blasphème renaît.
  • Parce que le futur est sombre.

1 - Atteintes journalières

  • Déclaration de G. de Robien, ministre de l’éducation nationale en Septembre 2005 : « Il faut donc donner une égalité de moyens à l’enseignement public et privé pour que ce choix puisse s’exercer. Le privé c’est aussi l’éducation nationale, l’école de la République.

Mélange des genres, soit, mais remarquons en passant que France 2 nous a appris que la société qui gère les radars automatiques qui nous attendent au bord des routes est une société privée dont le P.D.G. ne serait autre que le propre frère du ministre !

  • Le tribunal de Grande Instance de Lyon relaxe en juin 2005 l’iman Bouziane qui avait déclaré que le Coran autorisait à battre sa femme, mettant ainsi la charia au dessus des lois françaises.
  • Hésitations du Conseil d’état au sujet du voile islamique.
  • Faveurs de toutes sortes vis à vis de l’enseignement privé.
  • Le préfet de la Gironde incite les enseignants du public à assister à une messe.
  • Attitude des médias lors de mort de Jean-Paul II
  • Si la République a voulu soustraire l’enseignement aux frères des écoles chrétiennes, elle y a pratiquement réussi. Par contre l’enseignement confessionnel n’a jamais disparu. Non pas qu’en elles mêmes les écoles dites libres soient gênantes. Bien sûr nous préférerions un système national unique d’enseignement seul susceptible de réaliser l’égalité des chances et que ce système soit doté des moyens suffisants pour réaliser sa tâche. Il nous faut bien constater que ce n’est pas le cas. Alors considérons que l’enseignement privé est un moindre mal et, avec optimisme espérons qu’il devrait aller vers sa disparition.

Ceci dit nous considérerions comme « normal « que ceux qui ont recours à l’enseignement privé en supportent le coût, mais c’est loin d’être le cas. Nous savons ce qu’il faut en penser.

En 1850 la loi Falloux établissait des principes qui n’ont jamais été vraiment remis en cause et ce d’autant moins que les législations successives sont toujours allé dans le sens du renforcement de l’enseignement privé. Ne parlons pas des tristement célèbres lois de Vichy, leurs inspirateurs ne pouvaient penser autrement, mais que dire des accords Lang - Cloupet ou des positions de Régis Debray sur l’enseignement des religions à l’école. De ces hommes nous aurions pu espérer d’autres positions. Nous nous sommes fait des illusions !

Faut-il parler des financements des édifices cultuels par les diverses collectivités publiques ? Nous ne comptons plus les écarts vis à vis de la loi et dans ce domaine, encore plus que dans d’autres, tous les subterfuges et toutes les astuces sont bonnes pour déguiser un lieu cultuel en lieu culturel. De temps en temps la Cour des Comptes ou tout simplement la presse montrent du doigt un abus, ceci finalement sans conséquence pour leurs auteurs.

2 - Territoire : exceptions officielles :

La Révolution Française allait dans le sens de la Laïcité, mais la réaction veillait.

C’est dans ces conditions que Napoléon se rapprocha de la papauté et que fut conclu le concordat de 1801. Un peu plus tard des articles organiques furent ajoutés concernant l’exercice des cultes catholiques et protestants ainsi que le culte israélite.

Dans ce contexte nous nous intéresserons à l’annexion de l’Alsace et de la Moselle par l’Allemagne en 1871. En1905 la République Française décidait la séparation des églises et de l’état. En 1918 l’Alsace et la Moselle rejoignent notre communauté nationale avec la caractéristique suivante : pendant le temps passé sous administration allemande ces départements avaient gardé le régime concordataire de 1801, celui-ci amélioré d’ailleurs par l’empire allemand. Il fut décidé en 1918 de conserver provisoirement le statu quo ; il dure encore.

Il existe donc en Alsace Moselle quatre cultes reconnus par l’état : catholique, israélite, réformé et confession d’Augsbourg. Les biens appartenant à ces cultes ont le régime d’établissements publics du culte assorti des avantages fiscaux propres aux associations cultuelles ; les prêtres et évêques sont salariés de l’Etat, ainsi que les autres ministres des autres cultes. Nous rémunérons donc quelque 2200 ministres ; le Président de la République nomme les évêques de Strasbourg et de Metz.

En ce qui concerne l’enseignement il est confessionnel dans le primaire, neutre avec enseignement confessionnel dans le secondaire, sauf dispense. De plus il existe une Faculté de théologie à l’université de Strasbourg. Elle n’était pas prévue dans le concordat et fut créée le5-12-1902 à la suite d’un accord passé entre le gouvernement allemand et la papauté. Nous l’avons conservée.

La Guyane où une ordonnance de Charles X du 27-8-1827 institue dans ce département un régime identique à celui de l’Alsace Moselle mais pour le seul culte catholique. 28 membres du clergé catholique sont rémunérés.

Saint Pierre et Miquelon où seul le culte catholique est reconnu et où la collectivité locale entretient les locaux du culte et participe à la rémunération des prêtres.

Enfin le territoire de Mayotte où malgré les tempéraments récents apportés par le Conseil d’état et la loi il existe encore un statut quasi officiel de droit islamique.

3 - Plan fiscal

Il est une attaque beaucoup plus insidieuse de la Laïcité qui est très peu souvent soulignée : il s’agit des dons et legs faits à des associations habilitées à les recevoir. L’intérêt de ces dons réside dans la possibilité de les déduire des déclarations d’impôt sur le revenu dans une proportion égale à 60% de leur montant dans la limite de 20% du revenu net imposable étant entendu qu’au delà de la limite de 20% l’excédent est reportable sur les cinq années suivantes. Ainsi 50 Euros donnés ne laissent en réalité que 20 Euros imposables.

Bon nombre de Fondations et d’Associations ont un but humanitaire incontestable, d’autres moins, non pas que le but affiché ne le soit pas, mais on peut supposer et plus que supposer que les fonds recueillis peuvent servir à d’autres fins que celles annoncées.

Ce qui est critiquable ce n’est pas ce que chacun fait de son argent, car chacun est libre dans ce domaine comme dans les autres. Ce qui est anormal c’est qu’un avantage fiscal accompagne un don fait à titre personnel au titre de convictions religieuses individuelles.

Ceci pose trois types de problèmes :

  • Pour le premier à l’évidence par la voie de la déduction fiscale, de legs en franchise de droits, de dons ouvrant droit à une réduction d’impôt égale à 60% de leur montant, l’état indirectement subventionne le phénomène religieux.
  • Pour le second il faut bien constater qu’il y a inégalité entre les citoyens puisque rien n’est prévu pour les athées à moins qu’ils ne versent à la ligue pour la protection des oiseaux, ligue par ailleurs éminemment respectable.
  • Pour le troisième il faut bien considérer que les besoins financiers de l’état sont tels que tout avantage fiscal accordé trouve sa contrepartie dans une imposition plus forte dans d’autres domaines si bien que les athées, agnostiques, libre penseurs et autres mécréants financent indirectement les églises, ce qui est un comble !

4 – Délit de blasphème.

Le délit de blasphème revient et si nous n’y prenons garde entrera un jour dans le corpus de nos lois françaises ou peut-être plus sûrement européennes.

Une campagne de publicité utilise la cène de Léonard de Vinci. La conférence des évêques de France assigne l’agence et la fait condamner à 10.000 Euros d’amende, au retrait de l’affiche et à 100.000 Euros d’astreinte par jour de retard.

Devinette : combien pour un prêtre pédophile dont le crime est infiniment plus grave ? et combien pour l’évêque qui est resté muet ?

L’écrivain Houellebecq, dont on pense par ailleurs ce qu’on veut, écrit que l’islam est la religion la plus con et est trainé devant les tribunaux par des organisations islamiques. Il est heureusement mis hors de cause.

Devinette : Condamnerait-on Dunn Scott, éminent théologien qui vers 1300 écrivait : »Et les sarrasins disciples de Mahomet, ce porc immonde, quelles preuves pourraient ils alléguer en faveur de ses écrits, eux qui espèrent pour béatitude ce qui convient aux porcs et aux ânes, à savoir la gueule et le coït. »

5 – Un futur déjà peut-être annoncé.

Le pire adversaire de la Laïcité n’est peut-être pas celui qui travaille dans l’ombre. Le pire ennemi est celui qui annonce ses intentions à l’avance. Généralement on ne le croie d’ailleurs pas tant la chose paraît grosse. C’est la raison pour laquelle un livre récent ne peut que retenir notre attention tant les déclarations de l’auteur sont inquiétantes pour l’avenir, je veux parler du livre de Monsieur Sarkozy : La République, les religions, l’espérance.

Je n’ai aucunement l’intention d’engager une quelconque polémique au sujet de l’auteur de ce livre. Mon propos est seulement d’illustrer la dérive actuelle d’un certain nombre d’agents et de faiseurs d’opinion qui se disent partisans déterminés de la Laïcité et qui dans le même temps la vident de sa substance.

Personne ne fera grief à l’auteur de ses convictions personnelles, elles sont éminemment respectables : « Je suis de culture catholique, de tradition catholique. Même si ma pratique religieuse est épisodique, je me reconnais comme membre de l’église catholique, j’aime cette démarche d’aller en famille à la messe… »

Mais il ajoute : » La place de la religion dans la France de ce début de troisième millénaire est centrale…mais je veux préciser que ce n’est une place à l’extérieur de la République…C’est une place dans la République. »

Il ajoute néanmoins comme gêné : » Je considère que la séparation entre l’état et les églises est une condition déterminante de la paix religieuse. »

Je m’en tiendrai donc à sa vision de la Laïcité.

« Doit-on considérer ce qui a été rédigé il y a un siècle comme coulé dans le marbre et ne devant jamais être changé ? Je ne le crois pas. On peut faire évoluer le texte. Il reste néanmoins une question à régler, qui n’est pas conjoncturelle, qui n’est pas anecdotique : c’est celle du financement des grandes religions de France. »

Bien entendu on a perçu la difficulté de l’exercice et on s’empresse d’ajouter : » La Laïcité est une composante de notre démocratie…Les règles fondamentales de la Laïcité n’ont pas à changer parce que cela arrangerait tel ou tel. En revanche je dis que nous devons revenir à une Laïcité active, et non passive ou honteuse parce qu’il s’agit de religion ».

Comprenne qui pourra !

Et de continuer : » Au nom de quoi nos Universités seraient-elles fermées aux ministres du culte ?

C’est alors moi qui questionne : Va-t-on enseigner à l’université des choses contraires aux droits de l’Homme ? Va-t-on y enseigner l’inégalité entre l’homme et la femme ? que la femme n’a droit qu’à une demi part en cas d’héritage, que son témoignage devant la justice ne compte que pour un demi témoignage, que la femme peut être répudiée sans formalité ou lapidée si elle est infidèle ou simplement soupçonnée de l’être, que l’esclavage est légal. Va-t-on condamner avec l’autorité de l’université le divorce, l’I.V.G., le Pacs. Pourquoi ne pas reconnaître la charia et l’enseigner dans nos facultés de droit.

S’est on rendu compte que toutes les religions et spécialement celles du livre proclament des principes contraires aux Droits de l’Homme ? Or tout doit s’apprécier à l’aune des droits de l’homme !

Ensuite il faut construire des lieux de culte : » Il reste néanmoins un problème spécifique à l’islam : la communauté musulmane n’a reçu aucun patrimoine en héritage, puisqu’elle est nouvelle sur le territoire ». Cette manipulation vaut la peine d’être relevée. Il existe certes en France un bon nombre d’églises et d’églises anciennes : qui les a payé ? Certainement pas les rois de France sur leur trésor qui n’était d’ailleurs constitué que de l’argent prélevé sur le Peuple. Ceux qui ont payé les églises et autres cathédrales ce sont les fidèles dûment sollicités par le clergé et encouragés par l’attribution d’indulgences. Il en fut de même sous d’autres formes pour les protestants et les juifs.

Notre ministre s’est aperçu de l’énormité et ajoute aussitôt : » Le financement du lieu de culte proprement dit doit être laissé aux fidèles ce qui set normal et préférable ; en revanche les annexes, les parkings, la salle culturelle et non pas cultuelle peuvent recevoir des aides. »

Enfin de s’apitoyer sur la condition difficile des prêtres catholiques : » Les ministres du culte ont un statut social imparfait et modeste qu’ils soient imans , pasteurs, prêtres ou rabins. Prenons l’exemple des prêtres catholiques : leur situation sociale n’est ni viable ni enviable.

Je remarquerai simplement que c’est d’abord le problème des fidèles s’ils laissent les ministres de leur culte dans une situation difficile. C’est à eux de prendre en charge leur clergé, que leurs dons soit à la mesure de leur foi ; après on verra bien.

Le jour où on formera le clergé aux frais de l’état, c’est à dire aux nôtres, où on construira des édifices du culte et où on rémunérera les clergés, n’aura-t-on pas en une seule fois reconnu, subventionné et salarié les religions et du même coup aboli la loi de 1905 ?

LAÏCITE et Franc-Maçonnerie

Les premiers Francs- Maçons n’ont sans doute pas été des laïques au sens moderne du terme.

On ne peut sans doute pas soutenir qu’Anderson est un précurseur d’Emile Combes ou de Jules Ferry.

Ce sont les attaques de l’église catholique et la contemplation des malheurs occasionnés aux hommes par les conflits religieux qui ont amené les Francs- Maçons a penser que la paix et le bonheur de l’humanité, ainsi que leur propre sécurité nécessitait un état laïque.

Par ailleurs l’idéal de progrès de la Franc- Maçonnerie à se sentir proche des partis de gauche qui luttent contre l’ingérence cléricale dans les affaires de l’état.

Ceci est particulièrement vrai pour le Grand Orient de France même si cet engagement semble vu de l’extérieur peu compatible avec le fait de laisser ses métaux à la porte du temple.

Une des causes du malaise actuel de l’Obédience réside peut-être bien dans l’abandon de cet idéal de vie.

Ce qu’il faut considérer c’est que la Franc- Maçonnerie veut organiser la Cité par le seul exercice de la Raison sans recourir à quelque transcendance que ce soit. Le jour où en 1877 le Grand Orient de France a décidé de ne plus faire référence au grand architecte de l’univers il a décidé de la liberté de l’homme qui pourra croire ou ne pas croire.

L’adoption de la laïcité interdisant aux religions la possibilité d’interférer dans les affaires de l’état devenait alors évident pour l’Obédience.

Ceci permit de développer à destination de la Cité un certain nombre de thèmes qui se sont ensuite traduits dans la législation :

  • Sur le travail qui permet à l’homme d’être un acteur social avec tout ce que ceci implique dans la défense de ses droits par l’action syndicale, dans sa formation continue, gratuite, laïque, obligatoire, dans ses loisirs, dans la protection de sa santé, dans la prévision de sa vieillesse.
  • L’Homme acteur social doit être libérée des contraintes des églises, c’est à dire qu’il faut refuser aux religions qui passent le droit de gouverner l’humanité qui dure..
  • Sur la notion de liberté qui conduit à s’opposer aux internationales noires ou rouges. Les deux ont persécuté la Franc- Maçonnerie dès qu’elles ont eu la possibilité de le faire.

C’est également la libération de la femme, le développement du patriotisme, l’attachement aux valeurs de 1789, l’intégration des immigrés. En quelque sorte sortir de cette vallée de larmes et revendiquer une vie heureuse pour tous.

Dans ces conditions les trois vertus prennent tout leur sens :

  • La charité ou l’amour des hommes
  • L’espérance qu’un jour se réaliseront les rêves de justice, de paix et de bonheur
  • La foi dans la victoire de l’effort perpétuel

Cette conception de la société a conduit la Franc- Maçonnerie à concevoir, à impulser, à soutenir les lois qui allaient dans le sens qu’elle préconisait :

  • Décolonisation
  • Contrôle des naissances, planning familial, contraception, avortement
  • Législation sociale
  • Habitations à loyer modéré
  • Impôt sur le revenu
  • Réduction du temps de travail
  • Adoption du code du travail
  • Droit syndical
  • Assurances sociales
  • Majorité à 18 ans
  • Décentralisation

Les Loges ont travaillé sur les sujets les plus divers :

  • Recherche de paternité
  • L’alcoolisme
  • Les accidents du travail
  • Les retraites ouvrières
  • La réforme des institutions
  • La suppression de la peine de mort
  • Le droit au divorce par consentement mutuel
  • La suppression des tribunaux militaires en temps de paix
  • L’égalité des salaires
  • L’aide aux filles mères

Tous ces travaux en particulier lors des convents ont donné lieu a des lois :

  • 30-6-1881 :Liberté de réunion
  • 28-3-1882 :Enseignement primaire obligatoire, laïque et gratuit
  • 21-3-1884 :Légalisation et autorisation des syndicats professionnels
  • 5-4-1884 :Organisation communale
  • 27-7-1884 :Légalisation du divorce
  • 20-7-1886 :Développement des caisses de retraite pour la vieillesse
  • 2-11-1892 :Réglementation et limitation du travail des femmes et des enfants
  • 30-11-1894 :Première loi sur les habitations à bon marché
  • 9-4-1898 :Organisation des sociétés de secours mutuel
  • 1-7-1901 : Liberté d’association
  • 10-7-1901 :Assistance judiciaire
  • 9-12-1901 :Séparation des églises et de l’état
  • 3-4-1910 :Retraites ouvrières et paysannes

On peut dire sans exagérer que l’œuvre de la Franc- Maçonnerie a été immense et le plus souvent discrète.

S’il paraît actuellement un malaise dans nos Loges il résulte du fait que ne portant plus de projets à l’extérieur nous avons l’impression de trahir notre vocation profonde.

En guise de conclusion

La Laïcité serait incomprise parce qu’il s’agirait d’une notion parfaitement française intraduisible dans les autres langues.

Ceci est sans doute vrai. Il nous faut adapter notre langage et parler de Droits de l’Homme, notion comprise par tous et qui comporte la liberté de conscience. C’est sans doute sur ces concepts que nous pourrons faire mieux comprendre la Laïcité et la faire passer en Europe.

La Laïcité se réduit-elle seulement à la neutralité de l’état vis à vis des religions ?

Sans doute pas car l’Etat doit aussi ou se défendre contre le pouvoir croissant des médias et du pouvoir économique. Il doit aussi prendre à son compte l’écologie pour une société « vivable ».

C’est à dire être en accord avec l’article 1 de la Constitution de 1793 ou An I qui précisait :

« Le but de la société est le bonheur commun. »


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