Revue de presse

"Islamophobie" : « L’aveuglement, le clientélisme et le dérèglement idéologique de la gauche » (L. Bouvet, lefigaro.fr/vox , 4 nov. 19)

Laurent Bouvet, politologue, professeur de science politique. 5 novembre 2019

[Les articles de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

Propos recueillis par Alexandre Devecchio.

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FIGAROVOX.- Une manifestation contre Éric Zemmour a eu lieu devant le siège de CNews il y a deux jours. Certains propos étaient d’une violence rare : Abdelaziz Chaambi, fiché S, y a traité Éric Zemmour de « bâtard » et de « virus »… Sous couvert de lutte contre l’islamophobie, s’agissait-il en réalité d’une manifestation islamiste ?

Laurent BOUVET.- Ces images montrent d’abord qu’il s’agit d’une manifestation organisée par des islamistes, son initiateur principal étant Elias D’Imlazene, fondateur du site « Islam et Info », fiché S et, notamment, propagateur de fake news racistes et anti-roms. Ce qui soulève d’ailleurs une question : comment les pouvoirs publics peuvent-ils autoriser un tel rassemblement alors même que le président de République a annoncé une lutte sans merci contre « l’hydre islamiste » ?

Ces images montrent ensuite une grande violence verbale, faite d’appels à la haine nominatifs. Pratique courante des islamistes et de leurs alliés sur les réseaux sociaux, elle est mise en œuvre ici devant une foule qui applaudit de tels appels, avec tous les risques de passage à l’acte que cela induit.

Ces images montrent enfin comment les ennemis de la liberté d’expression se servent de celle-ci et donc notre faiblesse. Je note d’ailleurs qu’il a bien peu de réactions chez les habituels indignés, journalistes, politiques ou intellectuels, de gauche notamment, qui s’insurgent immédiatement lorsque les mêmes appels à la haine sont prononcés par l’extrême droite par exemple.

Abdelaziz Chaambi est un habitué de la scène islamiste depuis des années, coutumier de ce genre de discours. Il était d’ailleurs l’un des invités vedettes du colloque organisé à l’Université Lyon 2 (et finalement annulé) en 2017 sur l’islamophobie...

« Zohra Bitan, Lydia Guirous ou Zineb El Rhazoui » ont aussi été traitées de « bougnoules de service »...

On voit parfaitement ici le fonctionnement d’un deux poids, deux mesures qui est devenu systématique. Les pires insultes voire les menaces, racistes et sexistes, ne sont jamais relevées ni dénoncées par ces associations antiracistes quand elles sont proférées à l’encontre de ces femmes qui s’opposent à l’islamisme. Ce qui prouve si besoin en était une véritable préférence pour l’islamisme, que l’on constate désormais dans pratiquement toute la gauche antiraciste. On l’a personnellement mise en lumière ces dernières années à l’UNEF ou à la FCPE, ce qui nous a valu des campagnes de calomnie complaisamment relayées par tout une presse de gauche qui applique le même deux poids, deux mesures. D’ailleurs, le mot-clé utilisé par cette gauche pour calomnier ceux qui ne sont pas sur la même ligne qu’eux est le même que celui imposé par les islamistes dans le débat public pour désigner ceux qui les combattent : « islamophobe ».

Par ailleurs, dans une tribune signée dans Libération, 50 personnalités appellent à se positionner contre l’islamophobie qui stigmatise les musulmans. Parmi elles, Jean Luc Mélenchon, Philippe Martinez, Yassine Belattar, Rokhaya Diallo, l’avocat Arié Alimi, la journaliste Aida Touihri ou encore Benoît Hamon et Yannick Jadot...

La liste s’est même encore allongée depuis… Cette tribune et la manifestation à laquelle elle appelle représentent à mon sens un tournant important. Car au-delà des habituels activistes de la sphère islamo-indigéniste qui ne cessent de pétitionner, on trouve dans la liste des signataires tout un ensemble de gens issus de la gauche, disons, classique. Ils font ainsi clairement le choix de soutenir l’islamisme dans sa version politique contre ceux qu’ils appellent donc « islamophobes ». Une telle trahison de l’esprit républicain et des idéaux de la gauche est un tournant. C’est là « la gauche de la honte d’être soi » bien décrite par Jacques Julliard dans sa chronique du Figaro lundi dernier.

On entendra certainement dans cette manifestation des slogans et des appels à la haine du même type que ceux entendus dans la « manif anti Zemmour ». Pour une raison simple : les mêmes qui appellent et participeront à cette manifestation étaient devant CNews samedi dernier.

Pour ce qui est de la France insoumise, de la CGT ou de EELV, outre la trahison terrible que cela représente, on ne peut que s’étonner de ce clientélisme communautariste à courte vue. On rappellera au passage que Jean-Luc Mélenchon rejetait il y a encore quelque temps le terme même d’islamophobie, et prononçait l’éloge funèbre de son ami Charb tué dans l’attentat de Charlie Hebdo alors qu’il manifestera le 10 novembre au côté de ceux qui traitent Charlie Hebdo d’islamophobe et veulent le faire taire. Clientélisme communautariste à courte vue, à la fois parce que ce sont les islamistes qui bénéficieront de l’instrumentalisation de ces soutiens de gauche et non l’inverse, classique ruse de la raison historique, et parce qu’il est très hasardeux pour ces organisations de parier sur un électorat « musulman » qu’est supposé leur fournir un tel positionnement. On pourrait paraphraser ici à propos de cette gauche la célèbre citation de Churchill au lendemain des accords de Munich en 1938 : « Vous avez eu à choisir entre la défaite électorale et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur, vous aurez la défaite ».

Cette gauche est-elle naïve face au péril islamiste ou poursuit-elle une démarche clientéliste ?

Il y a évidemment un peu des deux, de la naïveté ou plutôt de l’inconscience face à la menace islamiste, et une démarche clientéliste communautariste envers nos concitoyens de religion ou de culture musulmane qui au passage sent bien le paternalisme colonialiste, celui-là même que cette gauche prétend dénoncer. Mais il faut y ajouter aussi une bonne dose d’idéologie, puisée à la fois dans la mauvaise conscience historique de la décolonisation et dans l’importation aveugle d’idées et théories multiculturalistes américaines. On soulignera d’ailleurs, une fois de plus, que c’est cette même gauche qui se réclame bruyamment de l’antilibéralisme qui est toujours la plus prompte à adopter la doxa libérale de l’extension infinie des droits individuels dès lors que cela concerne les « minorités » définies en termes identitaires.

Si l’on additionne le tout : aveuglement face à la menace islamiste, clientélisme sans espoir et dérèglement idéologique, on comprend assez aisément pourquoi cette gauche est massivement rejetée par nos concitoyens. On comprend aussi pourquoi au sein de cette gauche, on n’aime pas ceux qui alertent sur cette sortie de route historique et donc pourquoi ses séides insultent, calomnient et menacent tous ceux qui la mettent en garde depuis des années."

Lire "Islamophobie : « L’aveuglement, le clientélisme et le dérèglement idéologique de la gauche »".



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